J'ai retrouvé le chemin des mots
Et plongé dans la mer
J'ai joué dans l'écume douce-amer
Qui sert le cœur tendrement

Aux sons de la mélancolie
Au rythme des complaintes
J'ai souri

jeudi 30 août 2018

Oeil rouge, oeil bleu

Un jour dans la tempête
Je vis une femme
Elle était belle
Elle était le feu et l'alcool
Elle était l'hiver et la glace
Oeil rouge
Oeil bleu
Elle dansait dans la tourmente

Malgré la glace
Malgré le vent
Je fit quelques pas
Et tournais quelques temps
Au grès du chant

Les gens disent
Murmurent
Prétendent
Que je suis fou
Que je suis perdu

Mais jamais
Je ne mourrai de froid

L'espoir traqué

J'ai vu l'espoir dans le vent
Un soir
Un vol éperdu, fatigué
Le sourire figé
Et pourtant comme une lumière
L'espoir a traversé la nuit
La tempête
Et le temps

L'espoir est un oiseau blanc
Connu de tous
Moqué envié trouvé chassé
Comme une mouche dans les champs
Comme un air sifflé par mauvais temps
Pour chasser la paix
Et tirer à nous quelques lendemains
Faits de chaleur et de peau

Naufrage

La conscience est douloureuse
Trois heures avant l'écueil
Et le vent froid
Hurle "Ferme les yeux!"
Mais je veux garder la barre
Et faire ce naufrage

Les pieds sur terre
Enfin
Trouver un autre radeau

Pendu

Je voudrai voir une abeille
Crouler sous un fiel épais
Et mon hamac ensanglanté
Se balancer dans le vent

Oh ! Sers-moi de l'hydromel
Et ronge mon sang
Tourne mes ombres
Autour de mon corps
La cheville en haut les bras en croix
L'heure est venue de mourir un peu
Avant l'éveil

Le temps noir

J'ai vu le temps dilaté
Et prêt à exploser
Prendre un démon par les cornes
Et l'assouplir jusqu'à en faire
De la pâte à revolver

J'ai vu mon corbeau creuser une tour infernale
Et brûler des espoirs
Par tout les corridors
Flammes ardentes et danses folles
Farandoles sordides
La corneille mariée deux fois
A sonné le tocsin, le tintamarre
La torture
Et en sa maison secouée
Une tortue agonisante
A massacré quelques araignées
Sans même songer ou s'excuser

J'ai vu le temps dilaté
Prêt à s'évader
Voler, rouler, manger tant et plus
Rouler, manger, voler
Et finir trépané dans un fossé

J'ai vu l'ombre noire de mon père
Et la flaque sordide de ma mère
Crever les yeux d'une poupée sans nom
Et la laisser pourrir
En buvant du bon vin
Ce sont trois Cléopâtres
Qui ont tiré sur les charbons
Et ricané en dansant
Sur un chaudron de serpillères

J'ai vu le temps dégueuler
Mon âme de damné
Et rougir de honte
Devant les trois de l'univers
Au bord d'un trou
Noir comme l'enfer
J'ai vu le temps danser
Et ma chute continuer

J'ai vu des moustiques jaunes
Siffler mon sang de leurs trompes connes
Et vomir des banalités
Sous le feu sacré des projecteurs
Trois tours de piste encore
Avant de pisser sur ma tombe
Où les vers obscènes
Lèchent mon crâne
Lèchent mes côtes
Et broient du noir comme un marc de café
L'homélie a été oubliée
Et les chants bafouillés
Sur la pierre un épitaphe de masque élaborré
Fait fuir les passants
Et Hamlet tremble en son trône intérieur

J'ai vu le temps rigoler
Prêt à m'oublier
Et dans ma gorge un crapeud béant
Gueule après le vent divin
Il veut ses mouches et mes vertues
Et crache de dépit
Entre mes pustules mornes

Voyage

Voyager sur des ailes de soie pour devenir
Se faire creuset de la fortune
Faire de chaque rencontre un fil
Et tisser
Tisser tisser tisser
Un cocon étrange où dort mon âme troublée
Pour la mettre à nue
La dépouiller, nettoyer, l'envoler
Laisser au pas de la porte
Ces ailes de bois douloureux
Et les crochets rouillés rouges
De sang
Laisser pleurer mes tripes angoissées
Larguer les amares en somme
Et ne pas écouter
Les craintes de mon ombre

Voyage !
Voyage!
Voyage !

Voyage...
Entends-tu mes espoirs
Pousser mes espoirs déçus
Encore inquiets
Dans le creux de tes bras ?

Ailes de bois

Je suis un papillon aux ailes de bois
Beau dans la vitrine d'un immeuble
Malheureux sur les routes de bitume
Prêt à brûler pour la galerie
Pour la couleur dans mon dos
Et les larmes dans mon ventre
La lame dans mon ventre

Papillon aux ailes de bois mort
Prisonnier d'un souffle
D'un vol
Ce cruel mensonge
C'est un jour élégant
Faussement artistique
C'est le boulet du galérien qui s'ignore
Et rame
Rame de ses ailes de bois

Je suis un papillon sans ailes dans le noir
Et je tombe léger
Cheveux au vent
Épaules libres

Je sui un homme enfin
Le pas est mon rythme
Mon souffle
La vie simple mon chemin
Loin des vitrines des immeubles
Et des chemins de bitume

Je dormirai au pied des arbres
Et sourirai aux papillons
Loin du bois mort

Le loup blanc

C'est un loup blanc dans la savane
Le soleil est chaud
Brûlant
L'herbe cache l'horizon
Et son hurlement
Est resté dans la forêt
Pourtant c'est l’œil brillant
Qu'il noie son pelage dans la poussière
Et s'écorche les pattes
Il court en vain derrière d'étranges proies
Haletant tant et tant
Que sa langue goutte le sol étranger

C'est un loup blanc dans la savane
Il maigrit à vue d'oeil
Mais son regard brille
Sa truffe est humide
Sa bouche joyeuse
Et ses oreilles dressées
Il se nourrit d'un monde nouveau
Et laisse ses pensées danser
Face au danger il apprend à rugir
Face à l'arbre à grimper
Face au temps il se prend à voler

Qui revient à la forêt ?
C'est un loup blanc que nul n'a encore vu
Force
Sourire
Sagesse
Font danser la lune
Et rêver la canopée

lundi 6 août 2018

Toi, mon souffle

Un jour tu es apparue dans ma vie
Comme un souffle pur
Un air obscure et surprenant
Entraînant
M'entraînant
Vers l'avant et l'avenir
Vers le vent qui sourit
Celui qui dit
                    "oui"
Et
     "encore"

Et voici desnuits et des jours
Des promenades des projets
Des rires et des inquiétudes

Et aujourd'hui
Enfin
Déjà
L'autre surprise
Le troisième souffle
Nos espoirs
Et plus que jamais
La danse de nos sourires
Et de nos soupirs

Cette nuit-là

Il y eut cette nuit-là
A notre insu
Il y eut cette envie-là
Dans nos corps nus
Et voilà cette vie-là
Dans ta chaire tendue

C'est le rêve qui s'invite
Et nous surprend
S'accroche et nous apprend
Une nouvelle recette du bonheur

Déjà trois
Si tôt
Si tard

C'est le chant du maïs
Qui nous fait valser
Voyager dans le voyage
Espérer rentrer
Changés
Accompagnés

Nos envies

Je pense à toi comme cette nuit blanche
Pense à l'aurore
Comme une page blanche
Où danse l'or de mes envies

En vie, alors, je pense
A nos deux corps
Aux échos de ton cœur
-en transe-
A la chance de nos deux vies
Encore
A toutes nos pages blanches
Et l'or blanc de nos envies

Écrit à chaque aurore

A toi qui te couche

A toi qui te couche

Avec le mot fin en guise d'oreiller
Embrasse la mort pour nous

Qu'il ne reste rien de toi
Que l'empreinte de tes pas
Et dans nos coeurs
Et dans nos têtes fragiles

Laisse un tendre lit de mousse
Et quelques fleurs de paix

Dors sans fin

Dors dans une nuit sans étoiles
Et jette un voile noir
Sur l'amertume de nos regrets
Hante, oui hante nos souvenirs de toi
Et repose avec nos sourirs
Au creux de nos vies
Heureuses de t'avoir connue

Repose enfin
Libérée de notre tristesse

Les heures lourdes

Les heures lourdes se retiennent
Et même la peur
Garde ses échos
Les pieds engourdis et la mine sévère
Grave
Les heures lourdes précèdent la tombe

Les corbeaux sur nos épaules
Sont muets à nos oreilles
La couleurs même des fleurs
N'y change rien
Les heures lourdes avant la tomb
Parlent de l'inévitable
Et musellent toute joie

Le chat

J'ai vu le chat
Grimper le long de mon amante
Et planter délicatement
Mes griffes dans son dos
Installé dans ses cheveux
Il me nargue sans rancune
Et trône sans fard

Oh grand félin
Apprends-moi cette fierté
Et ce sourire en coin
Empereur de rien du tout
Sans le sous

Je veux être comme toi
Penseur de goutière
Et chasser les soucis

Le faucon

J'ai vu le faucon
Partir avec mes espoirs
Serres cruelles, oeil froid
Un beau rapace en vérité

J'ai criée tiré soupiré supplié appâté sifflé
Appâté
Le faucon est resté là-haut avec mon espoir

J'ai perdu la tête

Dansé bu rit chanté joué mangé
Dansé encore

Et me suis réveillé
L'espoir en oreiller
Le faucon sur mon épaule

Volé monté crié plané
Resté là-haut avec mon espoir
Mon bec joyeux et mes plumes tâchetées
Bu un bol de vent

Jamais rentré
Jamais regretté

Les sangliers

J'ai vu trois sangliers
Vautrés dans une mare de boue chaude
Se vanter des déboirs
Qu'ils infligeaient aux chasseurs
C'était comme l'insulte ultime
A la face de leurs bourreaux
Sans se soucier du lendemain
Sans se soucier du cri des chiens

Les trois sangliers se lançaient à la gueule
Des poignées de glands
A l'ombre des chênes protecteurs
Tantôt les avalaient
Tantôt les évitaient
Les trois sangliers
Oubliaient toute distinctionction
Dans l'écho de leurs rires

Au diable la bête féroce
Le noble vaincu
Trois joyeux compères
Groin levé, poil baveux
Règnent ainsi dans la forêt

Le lièvre

J'ai vu un lièvre blanc
Courir à genoux
Œil gris et poil luisant
Il sortait de son trou

Dans sa bouche délicate
Voici la Lune
Qu'il porte et veut planter
Dans son potager

Et toi !
Voler innocent !
Pause donc ton amante
Et couché dans le creux de son bras
Écoute-la donc chanter

Le vol du hibou

J'ai du vent dans mon cœur
Là où sifflent mes espoirs
J'ai du vent dans mon cœur
Par le trou de la Lune

C'est la danse qui me prend
Et me montre ta voix
Me porte à ton regard
Dans la nuit, loin de tout

Chante donc vers l'horizon
Offre-moi le rythme divin
Les mélodies innommables
Que répètent les étoiles
Comme le vol du hibou
Jamais vu ni entendu

Et pourtant il m'emporte
Comme toujours auprès de toi
Rapace bienheureux
Planant sur ton retour

mardi 27 mars 2018

Une gare bolivienne

Dans une gare bolivienne
On clame les destinations
On vend les villes à la criée
Empressement sans convictions
Qui rythme l'attente

Entre quatre corniauds
Un jardinet entretenu par un vieil édenté
Vaguement protégé
Par quelques mètres de grillage

Les taxis sont ici l'antichambre
Des bus à demi-lit
Et les agence exhibent leurs pancartes
Aussi criardes que leurs rabateurs

Sous les derniers nuages
De la saison des pluies
On vend de tout
Mais surtout à manger
A la sauvette ou en boutique

Enfin derrière nous la rue
Où chante un sifflet de police
Est la rivière de bitume et de gaz
Qui alimente les voyages au rabais

La cité de pierre

Il y a quelques éons
Des êtres de lave et de lenteur
Figés
Erigèrent cette cité sans noms
Ni plans ni ambitions

Aujourd'hui cs murs
Que nul maçon n'a monté
Ces tours
Que nul guetteur n'a veillé
Ce cirque
Que n'anima aucun théâtre
Aucune assemblée
Et ces statues colossales et surréelles
Qu'aucun sculpteur n'a rêvé

Sont la demeure des fourmis
Et des viscachas
Malgré les invasions barbares
Photos
Drones
Et pots d'échappement

Les crêtes

A l'appel de la crêtes
Quel cœur ne bat pas
Pleins d'espoirs et d'envies
Quel esprit ne rêve pas
Réussite
Défi
Merveille

Mais la crête est trompeuse
La crête est fuyante
Elle en cache d'autres
Et le bout du chemin
Se fait désirer
Tournant après tournant
Derrière chaque rocher
Après chaque souffle court
Elle nous appelle toujours plus loin
Plus haut haut
Plus dangereusement
Comment s'arrêter ?

Barrant l'horizon des hauts plateaux
Elle donne à Sayarama
"Celle Qui Est Seule"
Une air de bout du monde
Une promesse de chute sans fin
Et fait d'un canyon inca
Un labyrinthe à une voie

Enfin à l'improviste
Elle nous libère du désert
Révèle une vallée verte de mousse
Aux ruisseaux emmêlés
Où paissent les llamas décorés
Et mon esprit soupire
Soulagé
Mesure enfin la promesse de mort
Des champs de roche, de sable
Et d'herbe sèche

Là où rêvent les pierres

Quand sur la Terre vint la Vie
La Terre déclara

J'élèverai des montagnes si hautes
Que je prendrai l'oxygène
Et la chaleur du soleil
J'atiserai des vents de sable
Qui déchireront même les rochers
Fendus par le gel
Je ferai des rivières
De pierres
De soufre
Et de poussière
L'eau
Je la garderai
Et je la salerai
Je ferai pousser
Des champs de rocs
Et des volcans
Que j'écraserai d'un coup de poing
Pour ne laisser que des labyrinthes de rocs

La Vie répondit
Je me ferait buisson rachitique
Mousse dure
Et herbe sèche pour nourrir
Le lézard gris
Que nul ne verra
Le llama poilu et la vigogne
Sage et fine
Et dans les dédales de roches
Joueront les viscachas querelleurs
Dans tes lagunes salines
Bleues, blanches, rouges ou vertes
Ce seront d'improbables flamands
Et des mouettes criardes
Je serai aussi ténue que tenace
Et jusque sur tes sommets je planterai
L'opiniâtre para brava
Verte après la pluie
Jaune  sous le soleil
Brune face au gel
Et blanche dans la neige

Alors la Terre poussa plus haut
De nouveaux volcans fumants
Et de nouvelles montagnes
Courronées de blanc
Il lui fallut pousser
Quatre mille six cent mètres
Pour que la pierre
Le sable
Et la poussière
Puissent enfin rêver en paix
Et respirer des geysers

Et voilà que l'homme proclame
Je serai l'aventurier conquérant
Le prospecteur avide
Le touriste de masse
Et le rêveur abassourdi
Pour une poignée de photos je ferai
Des pistes insolentes
Des files
De cars et de voitures
Des milliers de kilomètres
Et des expéditions
Naines et triomphantes
Sur tes crânes blanchis

Mais la Terre ne répond pas
Et quand la poussière retombe derrière nos égos
Nous sommes passés à côté
De l’indicible rêve des pierres

La voiture

Dans la voitures
Deux allemands
Deux chiliens
Un guide bolivien
Et nous
Cabine absurde
Navette étrange
Sous l'arbre désodorisant
Aux couleurs étasuniennes
Résonnent reggaeton
Et musique des andes
Devant le chauffeur
Trône un dinosaure salé
La voiture est une bulle mesquine
Qui envahit montagnes et désert
Pour notre plaisir
Et nos contemplations

Les flamands

Entre les têtes eneignées
Et le corps pelé
Adoucis par le temps en lignes molles
Que ne renierait pas Dali
Quelques lagunes fragiles
Troublent le désert
Et accueille les flamands
De noir, de rose et de blanc

Etrange volatile
Longues pattes
Silhouettes frêles
Et bec lovés
Les danseurs qui marchent
Ornent ces oasis
D'eau, de sel et d'herbe sèche

Une halte

Au pied des reines blanches
Un champs de roches volcaniques
Que le temps, le vent, le sable
Et le ruissellement de l'eau
Ont fait labyrinthe jaune
Tacheté de vert
Et peuplé de faces étranges

Que vient faire l'homme ?
Une gargotte
Isolée et joyeuse
Où l'on grille du llama en saucisse
Où l'on plante un drapeau tout propre
Où l'on écrit avec des pierres
(Du haut d'un rocher
Nous jouons à Nazca)

Montagne zen

Ici la nature s'essaye au jardin zen
Avec des cailloux vérolés
Par le vent et la poussière
Sur le flanc des collines
L'érosion est le râteau géant
Pour tracer de larges bandes droites et minérales
Ailleurs les gravillons
En monticules se font socles
Pour de tenaces arbustes
Bien plus vieux que les bonzaïs

Enfin quand la pluie
Commet quelque flaque d'eau
Circulaires
Un îlot d'herbes folles s'y niche
Et l'oiseau discret vient y boire

Rien ne manque
Pas même le bidon abandonné

Le Salar

Le Salar après la pluie
Une étendue d'eau maigre
Pleine de nos egos
Photo par-ci
Photo par-là
Nos silhouettes dédoublées
Commercialisées
Oublient le lieu
Et ne retiennent que l'artifice

Tourne le regard

Voici des montagnes dans le ciel
Légères
Alors que nos pieds foulent
L'infime physique démente
Des cristaux de sel
- au loin l'horizon évaporé
mange la fin du monde-

Enfin respire
entre l'eau et le ciel
Derrière nos piaillements
La sérénité du courant
Qui emporte lentement
Tranquillement
Nos tongs vers l'horizon

jeudi 22 mars 2018

Un monstre plat

Le désert est un monstre plat
Plat et placide
Plus terrifiant que les montagnes qui le bordent
Ses lois sont autres
Et il nous engloutirait
Nous brûlerait de toutes parts
- en commençant parles yeux et la raison-
Sans y faire attention
Sans le remarquer

Ici la nature médite
Et refuse tout
Même l'eau
Même la chaleur
Même la marque de nos passages
Traces de pneus dérisoires
Insulte puérile qui ne change rien
Au fond
A l'aridité

Que faire du désert ?
Comment le comprendre
Le faire sien
Sans assécher
Nos rêves et nos espoirs

Seule la folie mène l'homme ici

Hier de l'eau pour des trains
Des trains pour du métal
Du métal pour du sang
Et de l'argent
Aujourd'hui quatre tondus
Le long d'une frontière absurde
D'un chemin de fer et de silence

Et ce chien noir
Dans la plaine blanche
Est un clown qui s'ignore
Le bouffon de notre farce

Dans le désert souffle un vent calme
Qui ne retient même pas
L'écho de nos paroles intimidées

Le lieu sans arbres

Dans le lieu sans arbres
Il n'est point de cachettes
Ni de secrets
Il n'y a que l'horizon

Au-delà de la plaine
Un trait
Net ou indistinct
Implacable
Qui ne le cède
Qu'aux lignes déchirées des montagnes escarpées

Ici règnent le vent et la poussière
Issue d'une terre ocre
Que défie le vert tenace et terne
De mousses opiniâtres et de plantes obtues
Epaisses et cassantes

Et quand tombe la pluie
Les rio salins mangent cette terre friable

Et rien ne pousse sur leurs berges
Tandis qu'ils dessinent dans leurs lits
Des poèmes indiscibles

Ailleurs la terre s'élève en de lentes collines
Aux lignes déchiquetées de rochers
Qui tiennent leurs assemblées immuables
Et silencieuses
Quelques cactus découpent les crêtes
Sentinelles timides
Attendant les étoiles

Où sont les vivants ?
Au bord de l'eau trois oiseau s'envolent
Noirs et furtifs
Et les vicognes dansent
Le long des routes poussiéreuses

Car l'homme grossier pause sa marque
Coupe l'immensité de voies et de pylônes
Mais ne s'attarde pas

Ici on ne fait que passer
On ne fait qu'admirer