J'ai retrouvé le chemin des mots
Et plongé dans la mer
J'ai joué dans l'écume douce-amer
Qui sert le cœur tendrement

Aux sons de la mélancolie
Au rythme des complaintes
J'ai souri

mardi 27 mars 2018

Là où rêvent les pierres

Quand sur la Terre vint la Vie
La Terre déclara

J'élèverai des montagnes si hautes
Que je prendrai l'oxygène
Et la chaleur du soleil
J'atiserai des vents de sable
Qui déchireront même les rochers
Fendus par le gel
Je ferai des rivières
De pierres
De soufre
Et de poussière
L'eau
Je la garderai
Et je la salerai
Je ferai pousser
Des champs de rocs
Et des volcans
Que j'écraserai d'un coup de poing
Pour ne laisser que des labyrinthes de rocs

La Vie répondit
Je me ferait buisson rachitique
Mousse dure
Et herbe sèche pour nourrir
Le lézard gris
Que nul ne verra
Le llama poilu et la vigogne
Sage et fine
Et dans les dédales de roches
Joueront les viscachas querelleurs
Dans tes lagunes salines
Bleues, blanches, rouges ou vertes
Ce seront d'improbables flamands
Et des mouettes criardes
Je serai aussi ténue que tenace
Et jusque sur tes sommets je planterai
L'opiniâtre para brava
Verte après la pluie
Jaune  sous le soleil
Brune face au gel
Et blanche dans la neige

Alors la Terre poussa plus haut
De nouveaux volcans fumants
Et de nouvelles montagnes
Courronées de blanc
Il lui fallut pousser
Quatre mille six cent mètres
Pour que la pierre
Le sable
Et la poussière
Puissent enfin rêver en paix
Et respirer des geysers

Et voilà que l'homme proclame
Je serai l'aventurier conquérant
Le prospecteur avide
Le touriste de masse
Et le rêveur abassourdi
Pour une poignée de photos je ferai
Des pistes insolentes
Des files
De cars et de voitures
Des milliers de kilomètres
Et des expéditions
Naines et triomphantes
Sur tes crânes blanchis

Mais la Terre ne répond pas
Et quand la poussière retombe derrière nos égos
Nous sommes passés à côté
De l’indicible rêve des pierres

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